2009年10月20日 星期二

Le scoop de Bakchich sur les frégates intéresse Taïwan


Lafayette, et voilà / lundi 19 octobre par Cyril Da, Nicolas Beau

Le quotidien le plus lu de Taïwan s’est intéressé aux carnets de l’ex-monsieur Finances du constructeur des frégates, révélés par le numéro 3 de Bakchich Hebdo.

La publication, dans Bakchich Hebdo n°3 , d’extraits des carnets secrets de Gérard Menayas, ancien directeur financier de la Direction des chantiers navals-Internationale (DCN-I), relance "l’affaire des frégates", du moins du côté de Taïwan, où le quotidien le plus lu du pays, United Daily News, nous a consacré un article. A Paris en revanche, ces révélations n’ont eu aucun écho !

Petite piqûre de rappel pour les (nombreux) lecteurs avides de comprendre.
1. Le contrat des frégates

En 1988, Thomson (devenu Thalès), fleuron de l’électronique de défense français, réussit une superbe affaire : vendre à Taïwan six frégates "Lafayette" tout équipées. Le bien nommé contrat « Bravo » est paraphé en 1991. Montant : 2,8 milliards de dollars. D’autres entreprises comme la Direction des Constructions navales (DCN) participent à ce monumental chantier.

Pour faire passer le deal auprès de la Chine populaire, peu enthousiaste à l’idée que la France arme son petit voisin, 500 millions de dollars de commissions ont été versés.

Entre en scène l’intermédiaire vedette des frégates, Andrew Wang, alias "DD" : c’est par lui que les fonds vont circuler et transiter par la Suisse.

D’autres réseaux, ceux d’Elf, débauchés pour l’occasion, ont fait également du beau travail, officiellement pour arroser les dignitaires chinois.
2. Les rebondissements judiciaires

Chacun sait en France que tous les partis politiques ont été régalés par les subsides du contrat "Bravo", tout comme des diplomates, des hauts dirigeants de Thomson et d’Elf.

Une instruction sur les frégates est enfin ouverte en 2001 à Paris, en écho à la découverte sur les comptes suisses d’Andrew Wang, de plusieurs dizaines de millions de dollars. L’enquête est confiée aux juges Renaud Van Ruymbeke et Dominique de Talancé.

Beaucoup plus tard, en 2007, et alors que Van Ruymbeke peine dans son instruction en raison du secret-défense qui lui est opposé, les juges Desset et Hullin commencent à enquêter sur une histoire de barbouzerie pour le compte de la DCN Internationale, fer de lance de la Direction des Constructions navales.

Ils découvrent entre autres que la DCN, avec l’aval du ministre du Budget de l’époque, Nicolas Sarkozy, a créé en 1994 une officine au Luxembourg, Heine, destinée à acheminer les commissions. Ce qui, à l’époque, n’avait rien d’illégal. Seules les « rétro » commissions, destinées aux politiques et fonctionnaires français, l’étaient.
3. Taïwan réagit à "l’affaire Lafayette"

A Taiwan, destinataire des frégates, les gouvernements changent. S’ensuivent des règlements de comptes. En 2000, la police taïwanaise recherche officiellement Wang, soupçonné d’avoir commandité l’assassinat d’un officier qui enquêtait sur les commissions du contrat "Bravo". Le président de l’époque, Chen Shui-bian, met en place une commission d’enquête sur "le dossier Lafayette".

En octobre 2003, l’Etat taïwanais se constitue partie civile au motif que Thomson (devenu Thales) a violé l’article 18 du contrat "Bravo" qui interdit tout paiement d’intermédiaires.

Taïwan, qui a saisi la commission internationale d’arbitrage, demande 800 millions de dollars à Paris, soit le remboursement de 500 millions de dollars de commissions et de rétro-commissions et 300 millions de pénalités variées.

4. Le non-lieu judiciaire français

Mais en France, l’instruction de l’affaire des frégates par Van Ruymbeke se heurte au secret-défense et se conclut par un non-lieu, en octobre 2008. Officiellement, il n’y a donc jamais eu de commissions et de rétro-commissions. Donc rien à rembourser à Taïwan.
5. L’instruction des juges Desset et Hullin qui empêche d’enterrer le dossier

Dans son numéro 3, Bakchich Hebdo révélait que Gérard Menayas, directeur financier de la DCNI, avait rédigé des carnets sur les activités de son entreprise. Lesquels carnets ont été mis sous scellés par les juges Desset et Hullin dans le cadre de leur enquête sur la DCN.

Or, Bakchich Hebdo a livré des extraits de cette littérature fort instructive sur la destination possible des fameuses commissions. Rien à ce stade d’avéré ; mais il reste que l’interrogatoire de l’auteur et de ses principaux patrons à la DCN et à la DCNI s’impose.

Tout comme il paraît s’imposer que la commission rogatoire internationale lancée au Luxembourg, en janvier dernier, par les deux mêmes juges sur les officines qui distribuaient les commissions puissent revenir rapidement de l’étranger.

Autant de révélations qui suscitent l’intérêt du United Daily News à Taïwan. Pour le premier quotidien du pays, Nicolas Sarkozy a peu d’intérêt à se tirer une balle dans le pied en laissant cette instruction sur la DCN aller à son terme.

Le quotidien souligne aussi l’importance des personnalités françaises citées dans les carnets : six politiques, dont un ancien ministre des Finances, (Edouard Balladur), un ancien ministre des Affaires européennes devenu plus tard garde des Sceaux, (Elisabeth Guigou), un ancien ministre de l’Intérieur, (Charles Pasqua), sans parler du président en exercice.

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